quinta-feira, 9 de dezembro de 2021

DAVID NADEAU | Verónica Cabanillas Samaniego: au commencement était la foudre...

 


Au commencement était la Foudre.

La cosmogénèse perpétuelle, issue de la méditation solitaire de Verónica Cabanillas Samaniego et de ses expérimentations avec l’automatisme gestuel, correspond à une recréation de soi. Tout est sans cesse à recommencer, sans perspective apocalyptique.

En moins d’une microseconde après le Big Bang, soit juste avant l’émission du rayonnement fossile, un atome s’est formé dans l’inconscient ou le plasma primordial. Dans la forteresse d’Ollantaytambo, un monument commémore l’émeute moléculaire qui a eu lieu pendant les minutes ayant suivi cette nucléosynthèse surréaliste.

Au début de l’histoire de l’univers, le carbone est le résultat des réactions thermonucléaires qui ont eu lieu au cœur d’un soleil pluridimensionnel (phénomène céleste exceptionnel). Les étoiles sont avant tout des baies… Les dieux sont les désirs de la matière, à l’échelle du microcosme et du macrocosme.

Certaines molécules organiques, formées grâce à la collision des atomes des nuages interstellaires avec les particules du rayonnement cosmique, se sont combinées à celles qui baignaient dans l’océan originel de la nouvelle Terre. Les premières cyanobactéries, ainsi produites, commencent à modifier l’environnement de cette planète de manière irréversible et bientôt, deux démons végétaux se dissolvent dans une étreinte. Les plantes prolifèrent librement parmi les vagues pétrifiées.

C’est donc sous une atmosphère riche en utopie que, dotés d’un exosquelette, les premiers monstres animaux apparaissent, s’adaptant au milieu mytho-onirique dans lequel ils évoluent. Un insecte abyssal aveugle suit instinctivement le déplacement des courants telluriques.

Par la suite, c’est la physionomie humaine qui est réinventée, s’adaptant aux cataclysmes élémentaires que suscitent périodiquement les rythmes convulsifs de la vie intérieure. Dans une scène d’un vieux film comique muet, un automate humanoïde se penche pour observer attentivement la disposition spatiale des yeux et de la bouche sur un fragment de masque antique : celui de “l’Inca mutilé des doigts / qui pour idée avait un bras”, [1] du songe duquel le corps d’Antonin Artaud a été éjecté.

Les “villes cosmiques” conçues par Verónica Cabanillas Samaniego forment, à l’image de son esprit, un intermédiaire entre le microcosme et le macrocosme. La disposition urbanistique de leurs édifices imite donc autant la structure véritable de l’atome que celle de l’univers manifesté. La construction d’un complexe d’appartements en glace, d’un mausolée pour une étoile et d’un escalier géomagnétique réactualisent certains principes de l’architecture sacrée précolombienne.


Chacun des sanctuaires trapézoïdes répandues dans ces villes imaginaires est surmonté d’une antenne radar pivotante dont le réflecteur, à forme de croissant lunaire, capte le rayonnement cosmique. Le signal, directement produit par les éléments de réception/transmission inclus dans le dispositif, peut être traduit sous forme de poésie automatique, un peu à la manière du morse) :

“Ce vent cosmique qui a touché mon esprit dans ce voyage torrentiel de dévastation de moi-même, ces marées de feu gelé sur le désert brûlant de cette côte primitive ne cesseront jamais de brûler en moi ou dans le grand Pakatnamu ou peut-être le mal de la guerre a secoué un Huáscar, un corps démembré dans l’océan d’une terre à construire.” [2]

Comme la bobine de Nikola Tesla et l’accumulateur d’orgone de Wilhelm Reich, cette machine surréaliste emploie de mystérieuses sources d’énergie renouvelables et non-polluantes. Elle matérialise le rêve d’une technologie réintégrée harmonieusement avec la nature, de même que l’espoir de la fin de l’actuel règne destructeur du capitalisme industriel.


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DAVID NADEAU | Verónica Cabanillas Samaniego: in the beginning was lightning...

 

In the beginning was Lightning.

The perpetual cosmogenesis, resulting from the solitary meditation of Verónica Cabanillas Samaniego and her experiments with gestural automatism, corresponds to a recreation of the self. Everything has to be started over and over again, without any apocalyptic prospect.

In less than a microsecond after the Big Bang, just before the emission of the fossil radiation, an atom formed in the unconscious, or the primordial plasma. In the fortress of Ollantaytambo, a monument commemorates the molecular riot that took place in the minutes following this surrealist nucleosynthesis.


At the beginning of the history of the universe, carbon was the result of the thermonuclear reactions that took place in the heart of a pluridimensional sun (an exceptional celestial phenomenon). The stars are above all berries… The gods are the desires of matter, on the microcosmic and macrocosmic scale.

Some organic molecules, formed by the collision of the atoms in the interstellar clouds with the particles of the cosmic radiation, combined with those that were bathed in the original ocean of the new Earth. The first cyanobacteria, thus produced, begin to alter the environment of this planet irreversibly and soon, two vegetal demons dissolve in an embrace. Plants proliferate freely among the petrified waves.

It is therefore under an atmosphere rich in utopia that, equipped with an exoskeleton, the first animal monsters appear, adapting to the mytho-oneiric environment in which they evolve. A blind abyssal insect instinctively follows the movement of the telluric currents.

Subsequently, it is the human physiognomy that is reinvented, adapting itself to the elementary cataclysms periodically aroused by the convulsive rhythms of the inner life. In a scene from an old silent comic movie, a humanoid automaton bends down to observe attentively the spatial arrangement of the eyes and the mouth on a fragment of an ancient mask: that of “the Inca with the mutilated fingers / whose only idea was an arm”, [3] from which the body of Antonin Artaud was ejected.


The “cosmic cities” designed by Verónica Cabanillas Samaniego form, like her mind, an intermediary between the microcosm and the macrocosm. The urbanistic layout of their buildings therefore imitates the true structure of the atom as much as that of the manifested universe. The construction of an apartment complex in ice, a mausoleum for a star and a geomagnetic staircase reinterprets certain principles of pre-Columbian sacred architecture.

Each of the trapezoid shrines found in these imaginary cities is surmounted by a rotating radar antenna, the lunar crescent-shaped reflector of which captures the cosmic radiation. The signal, directly produced by the reception / transmission elements included in the device, can be translated into automatic poetry, a bit like the Morse code:

“This cosmic wind that has touched my mind on this torrential journey of devastation of myself, these tides of frozen fire on the scorching desert of this primitive coast will never cease to burn in me, neither in the great Pakatnamu or perhaps the evil of war shook a Huáscar, a dismembered body in the ocean of the land to be built. [4]

Like Nikola Tesla’s coil and Wilhelm Reich’s orgone accumulator, this surrealist machine employs mysterious sources of renewable and non-polluting energy. It materializes the dream of a technology re-integrated harmoniously with nature, as well as the hope of the end of the current destructive reign of industrial capitalism.

 

NOTAS

[1]. Antonin Artaud, “Ci-git, précédé de La culture indienne, 1947.

2. Verónica Cabanillas Samaniego, “Mito”. veronica-cabanillas.blogspot.com/2009/01/mito_23.html

3. Antonin Artaud, “Ci-git, précédé de La culture indienne, 1947.

4. Verónica Cabanillas Samaniego, “Mito”. veronica-cabanillas.blogspot.com/2009/01/mito_23.html




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[A partir de janeiro de 2022]
 

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UMA AGULHA NA MESA O MUNDO NO PRATO

Número 192 | dezembro de 2021

Curadoria: Floriano Martins (Brasil, 1957)

Artista convidado: Pablo Amaringo (Peru, 1938-2009)

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